Les films de Jean-Louis
Repérages #8
Repérages #8
Le 19 octobre par un temps d’automne, nous nous rendons au silo à grains de Cargill. Des nuages de pigeons s’échappent des créneaux. Nous poursuivons autour du bassin de Saint-Nazaire, découvrons un cimetière de bouées, de balises rouillées.
Douce en son voilier. Voici la traversée du bassin dans un petit voilier : Douce à la proue debout en robe blanche, cheveux au vent ; elle semble porter une légende, le bateau, lui, semble glisser facilement et va aborder au lieu que nous appelons le cimetière des bouées. Prises de vues depuis l’intérieur du bateau et depuis les berges avec montage alterné. Une musique électro-acoustique monte doucement en puissance ; elle est issue d’enregistrements de navires de tous ordres rentrant dans le port (Sylvie Noël). Ces bouées de grande taille en métal rouillé, certaines en couleurs vives sont échouées le long du quai en attendant on ne sait quoi. Douce descend du bateau et va évoluer sur le quai parmi les bouées. Des jeunes percussionnistes du conservatoire sont dissimulés chacun derrière une bouée et commencent à créer un rythme en les frappant avec des baguettes sous la direction de Bruno Lemaître.
Par un raccourci de cinéma on va la retrouver se promener dans certains endroits préalablement choisis du Petit Maroc. Dont peut-être une visite au perroquet du café l’Atlantique. Chemin faisant elle rencontre un lapin sentinelle qui la rapproche d’Alice (clin d’œil au pays des merveilles) (si on arrive à se faire prêter un lapin vivant) ; plus loin dans un endroit fait de clair-obscur deux Franju(s) comme abandonnés là attirent son attention, enfin elle rencontre un pêcheur en vareuse dans une pose et un cadrage dignes d’une carte postale du début du vingtième siècle. Elle peut également croiser un homme à tête d’ours partant tranquillement à la pêche sur la jetée. Et quelque part Marcel joue de l’épinette…
« Eclairez vos objets selon votre soleil, qui n’est point celui de la nature ; soyez le disciple de l’arc-en-ciel, mais n’en soyez pas l’esclave » Denis Diderot : « Pensées détachées sur la peinture ». Et où aller le chercher ce soleil personnel ? « Au fond du cœur » selon l’expression maintenant consacrée et qui date du XVIIème siècle dirait Benedetta Papasogli « Le fond du cœur, Figures de l’espace intérieur au XVIIème siècle ». Avec son minois d’Egypte, Douce, est celle qui a trouvé une lettre adressée à Toutankhamon :
« Près de cette petite colonne j’ai vu aussi, jeune Roi Toutankhamon, j’ai vu hier soir, un de ces soirs clairs de ton Egypte, j’ai vu de mes yeux ton cœur enfermé dans un coffret en or »
Celle qui garde ses rêves,
Celle qui glisse dans son corps,
Pour le dîner, avant la fin de tout.
Le 14 septembre 1833 arrive à Rouen un navire, « le Louxor » qui rapporte d’Egypte l’obélisque que l’on va plus tard ériger sur la place de la Concorde à Paris. Le Louxor reste longtemps au mouillage à Rouen devant le quai d’Harcourt. Un garçon de 12 ans est là ce 14 septembre qui rêve d’Egypte, il se prénomme Gustave, c’est un premier déclic pour celui qui deviendra Gustave Flaubert…
Le haut soleil seul gambade,
Rêve d’une nouvelle et douce lueur,
A bercer au silence d’ivoire,
Douce ne sait pas tout cela lorsqu’elle rebaptise par caprice peut-être, et par intuition sûrement, son voilier le « Louxor »
Quelque chose vit cachée dans ces roseaux
Caché du côté de l’âme
Douce, celle qui marche
De l’autre côté de la porte,
La porte dite aux Franjus
Ouvrir la rivière à peau voilée,
Effleurant l’opaline de son visage
Et pourtant feuilles graciles
Scintillant des hanches,
Jeune fille, la femme,
par une poignée de libellules,
Toute la vérité du monde.