La maison flottante

Le film sans fin

Musique : Sacate et Mampa d’Arturo Gervasoni
Flûte traversière : Céline Lamanda
Clarinette en sib : Fabrice Arnaud-Crémon
Remerciements : Les vieux gréements
Jean-Louis Le Bouler
Texte : Jean-Louis Vincendeau

Une maison inspirée

Le « Penpoulic » 5 est une maison flottante en construction. Qui dit « maison flottante » dit maison et dit flotteurs, Céline et sa flûte sont placées en lumière dans l’habitacle aux couleurs chaudes et dans un deuxième temps Fabrice joue de la clarinette sur les flotteurs bruts dans le hangar des Vieux Gréements. Leurs partitions sont l’oeuvre originale d’Arturo Gervasoni.

Ces éléments ont été construits séparément et dans deux endroits, la maisonnette se situe dans le jardin de notre charpentier aventurier et les flotteurs dans un hangar à bateaux. Un jour il faudra les réunir : une grue solide devra soulever la maison et la faire passer par dessus le garage, la poser sur la plateforme d’un camion spécial afin qu’elle soit déposée enfin sur les deux flotteurs qui l’attendent.

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Un charpentier de marine breton se promène le long des berges du Mékong et, sans connaître un mot de la langue, est, sur sa bonne mine, invité à passer de maison flottante à une autre maison flottante où les habitants vivent dans une grande proximité, l’un pêche à la ligne à l’arrière, l’autre fait des grillades à l’avant le tout baigné par la musique locale.

Ni Zan, un des grands maître peintres et calligraphes de la Chine ancienne a connu de son vivant la gloire et la fortune, il aimait naviguer sur le Fleuve Bleu et termina sa vie sur une maison flottante dans la sagesse et le détachement.

Il aime aussi les jonques, les cafés glacés (cà phê đen đá) avalés à longueur de journée. La pêche dans les canaux. Les amoureux assis sur la margelle du pont face au Bassac, regards perdus dans les lumières de la ville à la tombée de la nuit. Les réparations sauvages entreprises sur les bateaux quand la chaleur s’estompe, vaisselle et lessive à même le fleuve.

Revenu au pays commence une aventure, il s’est vite pris au jeu et n’a pas dévié de son projet initial : la maison flottante nommée le « Penpoulic V » comme l’aboutissement d’un rêve.

Nicholas Ray rêvait pour son dernier voyage d’une jonque, Wim Wenders a réalisé son rêve dans le film « Nick’s movie, Lightning over the water ».

Son nom vient de celui du village de ses parents en Bretagne. L’idée lui est donc venue en visitant le Delta, de là un émerveillement pour ces habitations bricolées le long de la berge et, suite à tout un cheminement intérieur, est né cet étonnant projet de restitution dans le contexte local.

Il a travaillé en Corée du Sud, en Afrique et au Vietnam et dans la torpeur estivale de la mousson, ce projet « fou » de maison flottante dans la durée consistait à réunir deux mondes nettement séparés ensemble.

« J’ai d’abord réalisé une maquette au dixième puis opté pour des matériaux d’ici mais aussi d’autres plus nobles comme le bois de rose, palissandre des Indes et pour les cloisons j’ai trouvé du papier de murier ».

Tout le confort est respecté à l’intérieur sans aucune perte de place et dans la restitution d’une ambiance vietnamienne, la réalisation d’un rêve encore une fois née de beaux souvenirs. Dix ans de travail en tout avec des arrêts et des reprises pour un résultat meilleur que prévu. Ce projet vient aussi avec le goût des voyages seul ou en famille. La réalisation de cet ouvrage hautement personnel est une scène dont le dénouement est retardé indéfiniment, c’est son petit côté « tchékhovien » sans le savoir. Il y a surtout un effet d’annonce dans cette affaire touchant parfois à la métaphysique.