Les films de Jean-Louis
La fiancée sans bouche du soldat au nid
La fiancée sans bouche du soldat au nid
La promenade du mardi 19 février 2019 peut ainsi se décliner à partir d’une ambiance à la « Gustav Meyrink »
Stanislas se nomme dans la fiction Pancrace, signifié ès mystère par Protée
Izabela reste Izabela pour l’instant
Douce reste Douce et discrète
.
1/ Izabela : une offrande goulument dévorée par de très jeunes naïades sauvages, évidemment dénudées absentes.
Elle danse avec des postures burlesques autour de la mare verte et embrasse la dernière lanterne ; elle danse pour rappeler les morts légendaires au regard oblique entre les lignes elles-mêmes embrouillées.
Elle danse sur une partition clandestine, explorant le territoire d’un rude bois de chênes et de loups garous mal famés, sacs d’os de l’histoire ancienne de son pays marqué de stigmates.
Elle danse tandis que sous les lentilles vertes de la mare, de jeunes naïades invitées par la danse de la fiancée sans bouche du soldat au nid sont prêtes à se montrer.
Elle mange les jonquilles, le corps tordu au pied de la lanterne, sans bouche comment est-ce possible ? Mains exsangues à la lumière de l’hiver sous la camisole, tout arrive dans les apparitions blanchies debout, éparpillant les oiseaux frileux en tourments contrariés.
Sur l’autre rive un soldat tranquille, Pancrace, promesse tendue, la barque n’est pas là pour traverser la mare putride.
Chambre de mimosa lumière poudrée, l’étang vert au canard mort. Tu n’as pas peur, penchée dans ta chasuble crue, pleine d’énergie.
On ne voit pas tes yeux,
Ton scrupule, Idumée/idée mue.
« À la source de tes yeux
un pendu étrangle sa corde. »
On ne voit pas tes yeux.
(D’après Paul Celan)
Et elle répond :
« Suis-moi
que je m’écarquille !
je te dirai tout bas
que parfois des mains poussent
à l’intérieur du cœur
et qu’elles recousent :
les cicatrices !
je te dirai
à fleur de peau »
(Edith Azam : « Suis moi »)
2/ Pancrace : berger soldat ou soldat berger ; des tâtonnements dans les ronces, ici, quelque chose nous écorche, dans ce jardin abandonné et sauvage dont on ignore tout, recueil de fantasmes autour de la maison dite « du pendu » ; par les chants d’en bas on se plaît à se faire peur. Et qui chante là au regard neuf pour s’effacer ou resplendir ? Déchirement fructifié, début de beauté, le chemin sans le sol, l’idéal inconnu, voici une allumette furtive ; lumière cependant conservée toute une vie.
Pancrace réfléchit, médite ; son bois de chênes traversé lentement dans la brume celte excommuniée, parcelles magiques, gardien de chevaux dans les plaines de Hongrie, il connaît les plantes et les bêtes et apprécie les lourdes ornières de chemins pour un chien noir lui-même bien seul.
Contrebandier, colporteur d’estampes licencieuses ; il est allé jusqu’aux Carpates, limite de son errance personnelle, Pancrace nous embarque dans une pérégrination narrative lente, sur les chemins sinueux empruntés par un Meyrink qui s’est toujours arrangé pour ne jamais dévoiler ses secrets.
3/ Douce au masque, un peu perdue ; heureusement Pancrace touche le menton de son masque avec tendresse ; Douce apprécie ce geste et reste en retrait ; elle est là, le soleil s’étonne ! Elle ne pèse pas sur le sol, elle n’embarque pas sa part d’histoire, juste une présence qui regarde. « Radiant sister of the day » comme le dit Percy Bysshe Shelley.